DIALOGUE AVEC UN ANGE

Extrait de Dialogue avec un Ange :

       « La vie nous laisse le choix d'en faire un accident ou une aventure. »

     Au bout d’une descente vertigineuse, dans un énorme fracas, le reste de l’avion a arrêté sa course entre deux parois rocheuses. De nouveau, il a glissé encore quelques dizaines de mètres pour s’enfoncer plus profondément dans la gorge et disparaître complètement dans une cavité. Une épaisse poussière aux odeurs de soufre et de silex frappé demeure en suspension le temps que les craquements et les gémissements résiduels cessent. Puis, progressivement, la nature a repris ses droits. Un immense silence s’installe, à peine rompue par le jacassement d’un geai effrayé. Complètement encastré dans le ravin, le morceau de fuselage échappe ainsi à tout regard. Uniquement le trou béant de la cassure est visible de l’extérieur et fait apparaître l’habitacle avec les sièges et les cabines de toilettes. Les coffres à bagages, effondrés, reposent sur les fauteuils et dans l’allée. L’étage d’en dessous, qui devait être une fraction de la soute, déchiré par les chocs et les dérapages répétés, est complètement aplati et ne mesure guère plus d’un mètre de hauteur provoquant par là même l’enflure plissée des côtés. Seule une petite partie de la queue a résisté. Trois ou quatre rangées d’assises, peut-être cinq. L’empennage et le gouvernail ont disparu, arrachés à l’atterrissage ou dans la descente. Les parois défoncées, rabotées, laissent apercevoir l’isolant et la cloison intérieure. Le plus étonnant est la façon dont cette portion a été sectionnée du reste du fuselage ; une coupure nette, tronçonnée, à découper selon les pointillés ! Tout à l’arrière, recroquevillé sur lui-même, au milieu d’un amoncellement d’objets de toute sorte, gît un homme.